La légende du vampire
Qu’ils viennent de Transylvanie, de Londres ou de Forks, les vampires ont depuis longtemps fasciné les esprits et sont toujours très présents dans la culture populaire. Ces monstres, à la fois dangereux et attirants, ont été popularisés par le roman Dracula en 1897. Cependant, ils existaient déjà depuis longtemps dans les croyances et la littérature. Revenons donc sur cette créature fascinante.

Etymologie et origines du vampire
Le mot vampire vient de la langue anglaise et c’est ainsi qu’il s’est popularisé dans le monde. Toutefois, à l’origine, il vient du mot français vampyre, provenant lui-même de l’allemand vampir qui viendrait lui-même des langues slaves, origine concrète du concept actuel du vampire.
Le vampire est un revenant qui a été imaginé à cause de l’inquiétude de l’au-delà et du mystère entourant le sang. Ainsi, il en existe de nombreuses variantes en fonction des pays. La créature « buveuse de sang » se retrouve sur tous les continents. Voici quelques exemples de vampires autour du monde :
- Alp dans le folklore germanique
- Asanbosam en Afrique de l’Ouest
- Aswang aux Philippines
- Bruxas au Portugal
- Bhūt en Inde
- Dhampire en Albanie et dans le folklore des Roms
- Jiangshi en Chine
- Latawiec en Pologne
- Nesuferitu en Roumanie
- Nukekubi au Japon
- Pontianak en Malaisie et Indonésie
- Ramanga à Madagascar
- Vrykolakas en Grèce
Globalement, toutes les créatures assimilées au concept de vampire sont des revenants ou des êtres démoniaques et ils boivent du sang. Mais alors, pourquoi ce concept est-il aussi présent partout dans le monde ? La consommation de sang est liée aux divinités anciennes, notamment dans l’hindouisme mais aussi en Egypte. Ainsi le lien est fait entre la peur du sang et l’ésotérisme. Plus tard, la Lamia, la Stryge, l’Incube et la Succube se rapprochent de cette idée dans leurs caractéristiques, mais tous ne sont pas des morts-vivants. Les vampires seraient donc des êtres magiques et maléfiques qui, comme les divinités, boivent du sang – cette fois-ci d’une manière impie et malfaisante.
Du point de vue comportemental, le vampire manifeste un goût prononcé aussi bien pour le sang que pour la chair crue. Il s’agit là, sans aucun doute, de l’élément le plus connu de la problématique vampirique.
Georges Drettas, Aspects de l’hémophilie vampirique

Le mot Nosferatu est aussi beaucoup utilisé, notamment par Bram Stoker dans Dracula. Il signifierait vampire en roumain. Cependant, Stoker a fait une erreur : le mot correct est nesuferitu, qui signifie diable ou démon.
Ce sont principalement les mythologies qui ont laissé l’idée du vampire dans les croyances populaires, même après la christianisation. Ainsi, les suicidés, les morts non enterrés, les non baptisés, etc. sont susceptibles de devenir des vampires.
Au Moyen Âge, on craint l’apparition des vampires religieusement, mais c’est véritablement au XVIIIème siècle que le suceur de sang provoque l’hystérie collective : en Europe, de plus en plus de gens sont suspectés d’être des vampires. On retrouve des cadavres étranges, gorgés de sang. On décide alors rapidement de leur enfoncer un pieu dans le cœur, juste au cas où… En réalité, ce sont les épidémies les responsables puisqu’on ne les comprend pas.
Caractéristiques principales
Dans de nombreux folklores, le vampire est un mort-vivant buveur de sang, qui se nourrit du fluide vital de ses victimes pour en tirer une force vitale. Il est donc immortel. Selon les légendes, il possède plusieurs pouvoirs :
- Transformer ses victimes en vampire
- Se transformer en chauve-souris, en loup ou en rats
- Se transformer en brume
- Force extraordinaire et grande vitesse
- Capacité de régénération, vieillissement ralenti voire inexistant
- Contrôle de certains animaux (notamment chauve-souris)
- Pouvoirs mentaux (illusions, contrôle mental, télépathie,…)
- Pouvoirs qui varient (contrôle de la météo, téléportation, vol,…)
Son seul défaut serait de ne pas supporter la lumière du soleil. Selon d’autres légendes, l’ail, le crucifix, l’hostie et les pieux sont aussi ses faiblesses. En effet, la religion chrétienne vient se mettre en opposition claire avec le concept du vampire, considéré comme démoniaque, ennemi de Dieu.

Pour devenir un vampire, il faut être mordu par un vampire. Parfois, cela provient également d’une malédiction. Dans la majorité des cas, c’est un vampire qui choisit de transmettre ses pouvoirs à une personne. Ainsi, celle-ci subit une transformation de durée variable et souvent douloureuse. Le nouveau vampire n’est plus humain ni vivant et ses canines s’allongent généralement.
A diverses périodes de l’histoire, les populations ont tenté de se protéger contre les vampires, ou ce qui s’y apparente. Au Moyen Âge, on tentait par tous les moyens de sceller les morts ou leurs tombes afin que, même s’ils se réveillent, ils ne puissent pas attaquer les vivants.
Le meilleur moyen de tuer le vampire reste, même après le Moyen Âge, de lui planter un pieu dans le cœur, un clou dans le crâne, de le décapiter ou de brûler son corps. Ainsi, les habitants déterraient les corps pour les mutiler ainsi. On pouvait aussi le démembrer.
Histoire littéraire du vampire
Le vampire est une créature très présente en littérature, principalement depuis le XIXème siècle. Toutefois, on retrouve cette thématique dès le XVIIème siècle. En Angleterre, plusieurs historiens relatent des témoignages à propos des morts-vivants. En France, c’est au XVIIIème siècle que le mythe se développe le plus. Les savants et philosophes de l’époque condamnent cette superstition, mais elle est bien présente.
C’est aussi à partir de cette époque que des traités de vampirologie sont rédigés, notamment par Philippe Rohr (1679), Otto (1732), Johann Christoph Harenberg (1733) et Michael Ranft (1734). Dans le même temps, en 1746, Augustin Calmet, théologien, rédige un fameux traité de vampirologie, le Traité sur les apparitions. Il y fait une synthèse des études sur le sujet et cherche les origines du mythe.
A la fin du XVIIIème siècle et au XIXème siècle, le thème du vampire est très exploité. En France, Charles Nodier contribue beaucoup à la popularisation du mythe. Voici un tableau de quelques uns des auteurs principaux de l’époque :
Date | Auteur | Ouvrage |
1764 | Horace Walpole | Le Château d’Otrante (qui a lancé les Gothic Novels) |
1797 | Goethe | La Fiancée de Corinthe |
1810 | John Stagg | The Vampyre |
1819 | John Polidori | Le Vampire |
1825 | Baron de Lamothe-Langon | La vampire, ou La vierge de Hongrie |
1836 | Théophile Gautier | La morte amoureuse |
1872 | Joseph Sheridan le Fanu | Carmilla |
1897 | Bram Stoker | Dracula |
Le Vampire, Carmilla et Dracula sont les références de la littérature vampirique.
Le Vampire de John Polidori
Le Vampire a longtemps été attribué à Lord Byron, mais la réalité est plus complexe. En effet, en 1816, Byron invite chez lui sa maîtresse et les Shelley. Ils se lancent un défi littéraire : écrire une histoire de fantômes en une journée. Mary Shelley écrit alors Frankenstein et Byron le début de la nouvelle Le Vampire. Ne l’ayant pas terminé, son médecin et secrétaire John William Polidori compléte son œuvre.
La nouvelle raconte les péripéties d’Aubrey après qu’il ait rencontré Lord Ruthven, un homme étrange. Il le trouve rapidement dangereux pour la société et décide de partie en Grèce, où il tombe amoureux d’une femme nommée Ianthe. Malheureusement, celle-ci se fait assassiner. Il retrouve alors Lord Ruthven qui reste à son chevet pendant sa convalescence. Au cours d’une fouille archéologique, Lord Ruthven se fait blesser mortellement et révèle de façon énigmatique à Aubrey ses « crimes ». Ce dernier découvre aussi que le vampire a tué sa bien-aimée, Ianthe. De retour à Londres, Aubrey accompagne sa sœur à une soirée à la cour et croise Lord Ruthven qu’il croyait mort. Aubrey sombre dans la folie et le coup de grâce arrive lorsqu’il apprend que Lord Ruthven va épouser sa sœur. Fou de désespoir et de colère, il fait éclater un vaisseau de sa gorge, lui provoquant une hémorragie. Juste avant de mourir, il révèle le secret du vampire, mais il est déjà trop tard.
Voici un extrait qui présente Lord Ruthven :
Au milieu des cercles de la haute société que le retour de l’hiver réunit à Londres, on voyait un seigneur aussi remarquable par ses singularités que par son rang distingué. Spectateur impassible de la gaîté qui l’environnait, il semblait ne pouvoir la partager. Si la beauté, par un doux sourire, fixait un instant son attention, un seul de ses regards la glaçait aussitôt et remplissait d’effroi ces cœurs où la légèreté avait établi son trône. La source de la terreur qu’il inspirait était inconnue aux personnes qui en éprouvaient les effets ; quelques-uns la cherchaient dans ses yeux gris et ternes, qui ne pénétraient pas
John Polidori, Le Vampire
jusqu’au fond du cœur, mais dont la fixité laissait tomber un regard sombre dont on ne pouvait supporter le poids. Ces singularités le faisaient inviter dans toutes les maisons : tout le monde souhaitait de le voir. Les personnes accoutumées aux sensations fortes, et qui éprouvaient le poids de l’ennui, étaient charmées d’avoir en leur présence un objet de distraction qui pût attirer leur attention. Malgré la pâleur mortelle de son visage que ne coloraient jamais ni l’aimable incarnat de la pudeur, ni la rougeur d’une vive émotion, la beauté de ses traits fit naître à plusieurs femmes coquettes le dessein de le captiver ou d’obtenir de lui au moins quelques marques de ce qu’on appelle affection.
Cette nouvelle a connu un grand succès même si elle essuie quelques critiques. Elle a été adaptée au théâtre et à l’opéra.
Carmilla de Sheridan le Fanu

Aujourd’hui encore, l’image de Carmilla me revient en mémoire sous des aspects divers et estompés. Parfois c’est la belle jeune fille enjouée et languide ; parfois le démon aux traits convulsés que je vis dans l’église en ruine. Et j’ai bien souvent tressailli, au cours d’une de mes rêveries, en croyant entendre le pas léger de Carmilla devant la porte du salon.
Sheridan le Fanu, Carmilla
Le roman gothique Carmilla est une histoire courte écrite par l’auteur irlandais Joseph Sheridan le Fanu. Il raconte l’histoire de Laura qui vit avec son père dans un château en Styrie (Autriche). Un jour, elle fait un rêve étrange : une jeune femme vient lui rendre visite la nuit et la blesse. Evidemment, vous vous doutez que ce n’était pas un rêve… Quelques temps plus tard, une femme vient demander de l’aide car sa fille a été blessée. Ainsi, la famille accueille au château Carmilla, une charmante jeune fille qui commence à entretenir une relation très proche avec Laura. Cependant, de plus en plus d’évènements étranges se produisent au château et aux alentours. De plus, Carmilla est lentement en train de tuer Laura en s’abreuvant de son sang. Finalement, ils réussissent à retrouver le tombeau de Carmilla et à la vaincre.
Dracula de Bram Stoker

Publié en 1897, Dracula est un roman épistolaire de Bram Stoker et la référence absolue en ce qui concerne le mythe du vampire. Le comte Dracula est inspiré par la légende de Vlad Tepes (dont nous parlerons plus loin) et transformé en un vampire de Transylvanie :
Son visage n’annonçait rien de bon ; il était dur, cruel, sensuel, et les énormes dents blanches, qui paraissaient d’autant plus blanches entre les lèvres couleur rubis, étaient pointues comme les dents d’un animal.
Bram Stoker, Dracula
Au XIXème siècle, le comte Dracula (immortel) habite un château dans les Carpates et souhaite investir dans l’immobilier à Londres. Ainsi, Jonathan Harker est envoyé chez lui pour engager la transaction. Il se rend vite compte que Dracula est étrange, voire surnaturel. Dracula, comprenant que Mina Harker, la fiancée de Jonathan, est en quelque sorte la réincarnation de sa femme disparue, décide de se rendre à Londres pour la séduire. Il réussit et cause de nombreux problèmes dans la capitale anglaise (RIP Lucy), avant que le professeur Van Helsing ne se lance à sa poursuite jusqu’en Transylvanie, où il réussit à le vaincre.
Le roman aborde plusieurs thématiques dont la science, la folie, le lien entre la mort et l’amour, etc. On ne peut nier le fait que le livre ait inspiré à peu près toutes les histoires de vampires depuis sa publication.
Légendes vampiriques
Voici quelques histoires de personnes réelles ayant été suspectées de vampirisme et les légendes qui les accompagnent.
Vlad III Tepes « Dracula »

L’histoire du fameux Dracula remonte au XVème siècle, alors même que l’Empire Ottoman conquiert les territoires de l’Empire Byzantin (qui chute en 1453), dont la Valachie, principauté qui résiste à l’envahisseur. En 1447, Vlad II Dracul (le père de Vlad) conclut une paix avec les Ottomans. Cependant, il faisait partie de l’Ordre du Dragon qui considère Vlad II comme un traître : lui et son fils Mircea II le Jeune sont tués, évinçant totalement la famille Draculescu du pouvoir.
Vlad Tepes serait né entre 1431 et 1436. En 1442, il est envoyé comme otage au sultan Mourad II avec son jeune frère. Il reste à Andrinople jusqu’en 1448 et cela lui permet de se nouer des relations. Lorsqu’il revient en Valachie, il décide de se venger : il revient avec une petite armée pour prendre le pouvoir, mais échoue 2 mois plus tard. Il est alors exilé en Moldavie. Avec la chute de Constantinople, les troupes de Valachie et de Transylvanie sont envoyées défendre le territoire. Vlad III en fait partie, mais il va profiter de ces conflits pour reprendre le trône de Valachie en 1456. Il règne alors de façon autoritaire pendant 6 ans.
En 1462, Vlad III se lance dans une campagne contre les Ottomans qui fait plus de 30 000 morts. Néanmoins, la réponse ottomane couplée à l’action du frère de Vlad, Radu, contraint Vlad à fuir. D’après la légende, c’est à ce moment que sa femme, voulant s’échapper, tombe du haut de la falaise au pied de la forteresse assiégée et meurt. Vlad réussit à s’enfuir en Transylvanie, puis il est fait prisonnier en Hongrie pendant 12 ans. Une fois libre, il retourne en Valachie, à Bucarest. Jusqu’alors, il s’agit d’une petite bourgade et, selon la légende, ce serait la venue de Vlad III qui l’aurait fait prospérer. En 1476, Vlad est de nouveau prince de Valachie, mais il se fait assassiner. Sa tête est envoyée au Sultan qui la plante sur un pieu.
Si la vie de Vlad III est déjà mouvementée, ce n’est rien en comparaison de la légende qu’il laisse derrière lui. Son nom Tepes vient du roumain et signifie l’empaleur : en effet, il aurait la fâcheuse tendance à empaler ses contradicteurs ou ses ennemis. On dit aussi qu’il utilise toutes sortes de tortures pour assassiner ces derniers, telles que l’ébouillantage ou l’enterrement vivant. Evidemment, c’est très exagéré. Ce prétendu comportement monstrueux a ensuite dérivé, faisant de lui un buveur de sang et cannibale, un vampire.
Pour la légende, Dracula serait une sorte de vampire originel qui ne peut accéder à la paix éternelle, damné pour ses actions ante-mortem.
Elisabeth Bathory
Elisabeth vient de l’une des familles les plus anciennes et puissantes de Transylvanie. Ses parents, comte et comtesse, vivent une vie confortable et offrent à leur fille une éducation de qualité. Elle y reçoit également des soins car elle est régulièrement malade, peut-être d’épilepsie. A 11 ans, elle est mariée à un comte hongrois du nom de Ferenc qu’elle rejoint une fois la puberté venue. Cependant, un an plus tard, elle tombe enceinte, non pas de Ferenc, mais d’un domestique !
Même s’ils ne sont pas encore mariés, la faute est grave et elle doit accoucher en secret. Ils se marient tout de même en 1575, Ferenc souhaitant bénéficier de la puissance et de la richesse des Bathory. C’est d’ailleurs ce nom qu’il adopta. Ils ont ensuite 4 enfants. Ferenc est souvent absent car il doit aller combattre les Turcs. Même s’il est un grand guerrier (« chevalier noir de Hongrie »), il meurt en 1604 en campagne.
Elisabeth prend alors la tête du comté. Avant même la mort de son mari et évidemment après, elle développe un penchant pour la torture et la cruauté. Ainsi, elle « recrute » des domestiques pour épancher ses passions les plus sordides : elle les bat ou fouette à mort, les torture avec des tenailles, des aiguilles, du fer rouge et les enterre ensuite dans le parc ou les catacombes du château.
La légende veut également qu’elle prenne des bains du sang de ses victimes, espérant obtenir la vie éternelle. En effet, on la soupçonne aussi de sorcellerie et de recevoir des conseils d’une sorcière de la région. Le nombre total de victimes varie de 36 à 640, alors il est impossible de les compter raisonnablement. Un grand procès condamne tous ses collaborateurs à mort, ils sont incinérés et leurs cendres sont dispersées pour qu’ils ne trouvent jamais le repos.
Elisabeth, elle, est condamnée à la réclusion perpétuelle. Elle meurt en 1614. Il reste d’elle la légende de la comtesse sanglante, bientôt assimilée à un vampire par son lien avec le sang.
Jure Grando
Jure Grando est un paysan qui vit dans un petit village d’Istrie, en actuelle Croatie. On ne sait rien de sa vie, si ce n’est qu’il meurt en 1656. Selon la légende, il vient terroriser les villageois pendant 16 ans après sa mort, notamment le prêtre qui l’a enterré et sa femme. On imagine tout de suite qu’il s’agit d’un vampire et une expédition est menée au cimetière pour le décapiter (le pieu ne fonctionnant pas). Après cela, la paix revient au village. Il est le premier humain a avoir été qualifié de strigoi, autrement dit mort-vivant ou vampire, dans un écrit
Michael Kasparek
Depuis le XVème siècle, les épidémies de peste poussent les populations à reporter la faute sur les vampires. Cependant, ce n’est qu’au début du XVIIIème siècle que le premier cas de vampirisme « réel » est établi. L’histoire se passe à Lubló en Hongrie, en 1718. Cette ville est réputée pour son commerce du vin et c’est là-bas que Michael Kasparek y fait commerce – il y est d’ailleurs très connu. Un jour, on l’accuse de vol au cours d’un procès, puis il meurt de façon inattendue.
L’histoire pourrait se terminer ici, mais il se trouve qu’une rumeur commence à circuler en ville : le fantôme du défunt viendrait rendre visite à sa veuve chaque soir. Il n’en faut pas plus aux habitants de Lubló qui décident de déterrer le cadavre, de le décapiter, puis de le brûler en public. La légende, elle, ne s’arrête pas là puisque les compte-rendu parlent du fameux vampire attaquant les gens, mettant le feu aux maisons et bien d’autres facéties. En réalité, les habitants attribuent au vampire les agissements d’une bande de brigands.

Peter Plogojowitz
Nous allons évoquer ici la première apparition du mot vampire dans un rapport officiel. Cette histoire se passe en Serbie, plus précisément dans le village de Kisilova, en 1725. Peter Pologojowitz, un paysan serbe, décède à l’âge de 62 ans. Son fils raconte une histoire étrange : après environ 3 jours, le père est sorti de sa tombe et est rentré chez lui pour demander à manger à son fils, puis il est reparti. Le lendemain, il se passe la même chose mais, cette fois-ci, le fils trouve la mort. De même, dans la région, 5 ou 6 personnes décèdent rapidement d’anémie. Plusieurs autres personnes meurent dans des circonstances similaires, après avoir perdu une grande quantité de sang.
Etant donné que la rumeur est vivace, on déterre le cadavre de Peter Pologojowitz (apparemment, ils aiment bien déterrer des gars à cette époque) et surprise : le corps n’est pas décomposé, le cadavre est en parfait état ! Même les cheveux et la barbe ont poussé. On remarque aussi que du sang frais semble avoir coulé de sa bouche. Immédiatement, les habitants enfoncent un pieu dans le cœur du cadavre (une histoire de respect) : du sang en jaillit. Ils décident alors de brûler le corps au bûcher. Après cela, les morts cessent.
Evidemment, il s’agit d’une superstition : tous ces phénomènes sont naturels. Les morts ont probablement été contaminés par une maladie épidémique. Il faut aussi noter qu’une autre version existe dans laquelle c’est sa femme et non son fils qui accueille le mort-vivant.

Arnold Paole
En 1727, un soldat autrichien du nom d’Arnold Paole (ou Arnold Kol Paole) meurt en tombant d’une charrette de foin dans le village de Medvegia en Serbie actuelle. Au cours de sa vie, il prétend avoir tué un vampire et ainsi avoir reçu une malédiction. C’est probablement ce qui a nourrit la légende selon laquelle il serait revenu parmi les vivants pour boire le sang de la moitié de la population du village – rien que ça !
On décide rapidement de planter des pieux dans les cœurs de Paole et de ses victimes. Selon les dires, le corps de Paole était intact, il avait encore du sang en lui et il aurait poussé un cri au moment de l’acte. Une enquête a lieu et le mot vampire apparaît dans le procès-verbal.
Sava Savanović
Sava Savanović possède une histoire riche et intéressante. Paysan serbe habitant dans le village Zarožje en actuelle Serbie, il est assez aisé et respecté, jusqu’à ce que ses avances soient repoussées par une jolie jeune fille bien trop jeune pour lui. Il devient ensuite sombre et amer. Un matin, son frère le voit partir dans la forêt avec un pistolet : il le suit car il pense qu’il va faire une bêtise (et il disait vrai). En réalité, Sava va voir la jeune fille qui l’a éconduit pour lui redemander sa main. Evidemment, elle refuse.
Sava, en bon gros incel, sort son pistolet et fait feu. La jeune fille meurt et le frère de Sava se rue sur lui pour lui enlever le pistolet des mains. Les bergers alentours arrivent et voient 2 hommes se battre. Le frère prend peur et s’enfuit : ils en concluent qu’il s’agit d’un bandit et lui tirent dessus, le tuant sur le coup. Après avoir constaté leur erreur en voyant le corps de la jeune fille, les villageois se rendent chez Sava et le battent à mort avec des bâtons et des pioches. Il n’est pas enterré au cimetière mais jeté dans un ravin proche du lieu de son crime.
Selon la légende, Sava revient alors sous la forme d’un vampire pour terroriser les habitants du village. La famille de Sava décide alors de déplacer son cadavre pour l’enterrer près du vieux moulin à eau, dans la forêt. Le temps passe et le village oublie peu à peu Sava, mais bientôt une nouvelle rumeur apparaît : il paraîtrait qu’à chaque fois qu’un meunier vient mouliner son grain au vieux moulin, Sava en profite pour le tuer et boire son sang.

L’histoire ne s’arrête pas là ! Un jeune homme du nom de Strahinja est trop pauvre pour obtenir la main de la fille d’un riche fermier. Il consent alors à travailler de nuit au moulin pour gagner de l’argent. Une fois la nuit venue, il fait la rencontre du vampire qui dit clairement s’appeler Sava Savanović et réussit à s’en sortir en utilisant la ruse. Le matin venu, les villageois sont ébahis et le riche fermier accepte de donner la main de sa fille à Strahinja.
Suite à cela, les villageois décident de se débarrasser du vampire en recherchant sa tombe. Ils la trouvent et ouvrent le cercueil : le corps est intact et Sava a un œil ouvert et l’autre fermé, signe de vampirisme. On enfonce alors un pieu dans son cœur et on l’asperge d’eau bénite. Etrangement, un papillon sort de la bouche de Sava et disparaît dans la nature… Plus tard, la légende raconte que c’est maintenant sous la forme d’un papillon que Sava terrorise les habitants en faisant mourir les enfants et les bébés.
La légende de Sava Savanović est toujours très vive dans le village, surtout après 2012, lorsque le toit du moulin s’effondre et que l’on pense que le vampire se cherche un nouvel habitat. En réalité, le maire se sert de cette histoire pour faire venir des touristes. Dans tous les cas, l’affaire n’est pas résolue pour les habitants et Sava Savanović court toujours !
Le vampire d’Highgate
A la fin des années 1960, le cimetière d’Highgate à Londres est devenu le lieu de toutes les superstitions. En effet, en 1969, des jeunes férus d’occultisme se réunissent souvent dans le cimetière pour y faire des cérémonies occultes et profaner des tombes. En décembre, l’un de ces jeunes, David Ferrant, décide d’y passer la nuit (très bonne idée ça !) et il raconte ensuite avoir rencontré une grey figure, traduit en « entité grise ». Il met en commun son expérience avec d’autres « témoins » et ainsi plusieurs descriptions se font connaître : un grand homme portant un chapeau, un cycliste fantôme, une femme vêtue de blanc, des visages qui apparaissent ça et là… On parle aussi de sons de cloches ou de voix. Dans tous les cas, on croit à l’existence d’un vampire en plein Londres.
La légende urbaine se répand rapidement et une panique collective se créé au début des années 1970. Des « chasseurs de vampires » se rendent alors régulièrement sur les lieux dont Sean Manchester qui prétend avoir exorcisé un vampire, puis détruit un cercle de vampires (en voilà un qui n’a pas bu que du tea). La légende est toujours vivace aujourd’hui même si le cimetière est plutôt visité pour sa nature et son histoire.

Les vampires au Malawi
En 2020, au Malawi (pays du sud-est de l’Afrique), au moins 8 ou 9 personnes ont été suspectées d’être des vampires. En effet, on pense que ces gens ont bu le sang de leurs victimes. La population fait alors preuve de vigilantisme et se met à lyncher à mort plusieurs personnes soupçonnées. Qu’il s’agisse d’un coup politique, de violence gratuite ou de véritable croyance, les présumés auteurs de ces faits ont été arrêtés. Le Malawi est un pays où la croyance en la sorcellerie est très répandue. Logiquement, l’existence de créatures surnaturelles, dont les vampires, n’est pas autant remise en cause que des pays moins ouverts aux superstitions.
Voici un tableau récapitulatif des vampires dont nous venons de parler avec des informations synthétiques :
Date de mort | Nom | Nationalité | Actions supposées |
1476 | Vlad Tepes | Valaque | Empalements, tortures, cannibalisme, consommation de sang |
1614 | Elisabeth Bathory | Hongroise | Tortures, meurtres, bains de sang |
1656 | Jure Grando | Serbe | Tentative de viol sur sa femme, meurtres |
1718 | Michael Kasparek | Hongrois | Attaques, pyromanie |
1725 | Peter Plogojowitz | Serbe | Consommation de sang, meurtres |
1727 | Arnold Paole | Autrichien | Consommation de sang, meurtres |
Début XVIIIème siècle | Sava Savanović | Serbe | Meurtre (de son vivant), meurtres (après sa mort), infanticides |
Années 1960-1970 | Le vampire d’Highgate | Anglais (?) | Apparitions |
2020 | Les vampires du Malawi | Malawites, Mozambicains | Consommation de sang, meurtres |
Adaptations récentes
La littérature
Depuis Bram Stoker, de nombreux auteurs se sont penchés sur la question du vampirisme dans leurs ouvrages. Nous pouvons citer en particulier Anne Rice avec les Chroniques des vampires, un cycle de 13 ouvrages centré sur Lestat de Lioncourt, un vampire français qui vit des aventures à La Nouvelle-Orléans. Le maître de l’horreur Stephen King a aussi écrit sur le sujet dans Salem. Il s’agit de l’histoire d’un écrivain qui revient dans sa ville natale, y découvre un vampire et décide de le combattre avec d’autres habitants.
Enfin, cet article ne pourrait être complet sans évoquer la saga Twilight de Stephenie Meyer, composée de 4 tomes principaux et de 2 tomes complémentaires. On y suit Bella qui vient habiter chez son père à Forks dans l’Etat de Washington. Elle y rencontre le vampire Edward et le « loup-garou » Jacob qui seront les personnages principaux de ce triangle amoureux. Les thèmes principaux sont l’amour, la religion et le thème de la vie et de la mort. Vivement critiquée, et pas seulement pour ses adaptations cinématographiques, la série est tout de même très populaire et apporte un renouveau du vampire, même si celui-ci s’éloigne largement de la tradition littéraire.
Pour ce qui est des comics et mangas, nous pouvons citer Blade, un super-héros de Marvel qui est à la fois vampire et chasseur de vampires. Le comics a été adapté en une trilogie de films, avec dans le rôle principal Wesley Snipes. Les Japonais apprécient aussi la thématique vampirique dans les mangas, comme nous pouvons le voir dans Jojo’s Bizarre Adventure, Hellsing et Vampire Knight (entre autres).
Les films et séries
Plusieurs films ou séries ont vu le jour au XXème siècle et au XXIème siècle avec pour thème principal le vampire. Nous pouvons citer les adaptations de Twilight et Entretien avec un vampire, mais aussi et surtout celles de Dracula, qui sont multiples. Elles sont plus ou moins fidèles au roman de Stoker. Parmi elles :
- Nosferatu le vampire de 1922
- Dracula de 1931
- Le Cauchemar de Dracula en 1958
- Bram Stoker’s Dracula de 1992
- Dracula Untold de 2014


D’autres films évoquent la thématique vampirique comme la saga Underworld, dans laquelle les vampires et les Lycans s’opposent dans une guerre sans fin. La saga comporte actuellement 5 films.
Enfin, au niveau des séries, il est impossible de ne pas parler de Buffy contre les vampires de 1997, série très populaire dans laquelle Buffy Summers est une tueuse de vampires dans la ville de Sunnydale. Il s’agit d’une référence en matière de séries fantastiques et elle a constitué une large communauté de fans. Il existe également Vampire Diaries, série de 2009 qui est inspirée de Le Journal d’un vampire de L. J. Smith. Dans la ville de Mystic Falls, Elena rencontre 2 vampires, Stefan et Damon. La série nous fait suivre leurs aventures sur 8 saisons.
Les jeux vidéo
Pour ce qui est des jeux vidéo, plusieurs titres peuvent être évoqués :
- La saga Castlevania de Konami, série de jeux dans laquelle les Belmont, chasseurs de vampires, combattent sans relâche Dracula qui ressuscite régulièrement. La licence a débuté en 1986 et compte désormais plus de 20 épisodes.
- La trilogie Dracula Résurrection, un jeu d’aventure dont le premier opus date de 1999 et qui met en scène Jonathan Harker à la recherche de Mina en Transylvanie. Il s’agit d’un point and click qui, même s’il a vieillit, reste intéressant.
- La série Legacy of Kain, débutée en 1996, qui compte 5 jeux divisés en 2 catégories : les Blood Omen où l’on contrôle Kain, un vampire ; les Soul Reaver où l’on contrôle Raziel, un démon anciennement vampire. Ces jeux sont tous du genre action-aventure.
- Le jeu Vampyr de 2018, un action-RPG français dans lequel le docteur Jonathan Reid devient un vampire et est tiraillé entre son humanité et son côté monstrueux dans le Londres de l’après Première Guerre Mondiale.
- Les RPG Vampire: The Masquerade, basés sur le jeu de rôle du même nom, dans lequel on contrôle un vampire aux Etats-Unis. Le système de jeu est basé sur celui des jeux de rôles sur table (statistiques, choix, dialogues). La série compte actuellement 5 jeux.
- Darkstalkers, un jeu de combat de Capcom qui met en scène des créatures fantastiques et mythologiques. On y retrouve un zombie, des succubes, un démon et un vampire, Demitri Maximoff.
Sources
- Faivre Tony, Les Vampires, Essai historique, critique et littéraire
- Le Fanu Sheridan, Carmilla
- Morvan Alain, Dracula et autres récits vampiriques
- Polidori John William, Le Vampire
- Stoker Bram, Dracula
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